Premiers Emois
Au déclin de la belle saison, Antoine reprenait, sans enthousiasme le chemin de l'école ou plutôt du collège, le cartable sur le dos. Rester six heures par jour assis, l'attention concentrée sur les propos du professeur, était au dessus de ses forces, malgré toute sa bonne volonté Antoine s'ennuyait. De plus, l'utilisation du stylo, alors qu'il savait se servir d'une machine à écrire, lui paraissait tout à fait archaïque. Il n'attendait qu'une chose, que la cloche sonne la fin des cours.
C'est Azerty, la jeune secrétaire de son père, qui lui avait en cachette appris à taper à la machine. Il avait acquis une certaine dextérité dont il était très fier. Les soirs où elle restait classer quelques documents, il la rejoignait dans son bureau et s'exerçait à gagner de la rapidité. Il aimait par dessus tout lorsqu'elle venait rectifier son doigté. Alors il sentait dans son dos, la chaleur du corps de la jeune femme et avait l'impression que le sien allait éclater!
Monté sur son vélo, Antoine laissait son esprit divaguer. Il rêvait, perdu dans ses premiers émois. Il ne vit pas le nid de poule au milieu de la chaussée. Il fit une embardée et chuta lourdement. Étourdi le bras légèrement endolori, il resta au sol quelques instants. C'est alors qu'il perçut un énorme éclat de rire. Furieux, il se remit rapidement en selle cherchant l'auteur de cette hilarité. Azerty rieuse vint vers lui s'enquérir de son état mais vexé, honteux, il s'enfuit. Antoine comprit alors que son goût pour la machine a écrire était en fait dû au joli minois de la secrétaire. Il ne revint plus dans son bureau et n' utilisa plus jamais une machine à écrire.
Bien des années plus tard, Antoine fit fortune en créant un nouveau clavier d'ordinateur dont les lettres commencent toujours (encore aujourd'hui) par A-Z-E-R-T-Y en souvenir de ses quinze ans!
M-F Ouali
20 avril 2017